vendredi 11 mai 2012

Fukushima Vs Tchernobyl













 

 

La propension des personnalités politiques à crier victoire n’est certainement pas un mythe et en période de crise, quand l’opinion doit être contentée, ou lorsque les faits sont d’une exceptionnelle gravité, rares sont celles, pour ne pas dire aucune, qui ne cèdent pas à la tentation de fanfaronner devant les caméras lorsqu’elles ont la possibilité de le faire. Quitte à officieusement manquer d’informations ; les journalistes diraient quitte à ne pas avoir recoupé leurs sources au préalable… Nous nous garderons d’accuser péremptoirement M. Noda d’avoir péché par excès de précipitation, mais alors que le pays du soleil levant vit toujours des heures parmi les plus terribles de sa longue histoire et que la classe politique dans son ensemble « rame » pour recouvrer la confiance de ses concitoyens, il n’y a aucune raison valable de ne pas émettre l’hypothèse d’un décalage entre les allégations gouvernementales et la réalité du terrain.

La situation à Fukushima, cette centrale nucléaire de malheurs qu’il faudra de toute façon de trente à quarante ans pour démanteler dans son ensemble, est-elle aussi sécurisée que le prétend Tokyo ? Non, affirme l’ingénieur nucléaire Arnie Gunderson, interrogé par nos confrères du très sérieux Guardian et qui évoque« une longue bataille, loin d’être terminée ». Des propos accrédités par la découverte récente d’une (énième) fuite dans le système de refroidissement, décidément bien vulnérable, et par la montée du taux de radiations dans l’une des turbines de la centrale.
De même, la direction de l’exploitant TEPCO (Tokyo Electric Power COmpany) a révélé fin mars que le niveau d’eau dans l’enceinte de confinement du réacteur numéro 2 était très inférieur à ce qu’elle croyait jusqu’alors, ce qui pourrait vouloir dire que les barres de combustible ne sont plus immergées et commencent à chauffer. On rappellera aussi que, même en ayant recours à des robots, les turbines 1 et 3 demeurent impossibles d’accès, quatorze mois après l’accident, et qu’il est de fait impossible de savoir ce qui se passe à l’intérieur de ces structures.
Reste le réacteur 4, celui qui inquiète le plus les spécialistes et a subi de graves dommages structurels à la suite du tremblement de terre et du tsunami. Des centaines de tonnes de combustibles usagés se trouvent actuellement « perchées » au-dessus du sol, dans un bassin de refroidissement, exposées à ciel ouvert…

Pire que Tchernobyl ?
Ledit bassin serait le « maillon faible » de la centrale si l’on en croit la commission d’enquête indépendante sur l’accident nucléaire, auteure d’un rapport publié en février dernier. Ancien conseiller principal en politique au Département américain de l’Énergie, lui aussi sondé par le quotidien, Robert Alvarez estime quant à lui que,« si un tremblement de terre ou tout autre événement venait à affecter cette piscine, il pourrait en résulter un incendie radiologique catastrophique, avec près de dix fois la quantité de césium 137 qui s’est propagée à la suite de l’accident de Tchernobyl(Ukraine) » (!)
Effrayant, mais malheureusement plausible eu égard à l’activité tellurique soutenue au Japon depuis le séisme du 11 mars 2011. La centrale de Fukushima n’est certainement pas à l’abri d’une nouvelle secousse, qui vu son état aurait des répercussions impossibles à déterminer, mais dont il ne fait pas le moindre doute qu’elles seraient calamiteuses. Déjà très critiques quant à la gestion de la catastrophe – elles ont notamment jugé insuffisant le périmètre de sécurité de vingt kilomètres autour de la centrale fixé par leurs homologues nippones dans son sillage, ce qui a provoqué des tensions diplomatiques -, les autorités américaines ont haussé le ton il y a peu par la voix du sénateur Ron Wyden, lequel a exhorté le Japon à retirer les barres de combustible irradiées des piscines vulnérables. Leur transfert est néanmoins, on s’en doute, à très haut risque.
Au total, et même si les médias ne s’émeuvent plus guère de son sort, Fukushima continue donc de ressembler à une cocotte-minute. Une cocotte-minute déjà très endommagée et sur laquelle la colère de Dame nature peut toujours s’abattre.
On ne s’offusquera pas dans ces conditions de l’arrêt ce week-end du dernier réacteur nucléaire encore en service dans le pays et du fait que le gouvernement fasse les yeux de plus en plus doux aux technologies propres, le solaire et la géothermie en particulier.

Source :"San Finna"

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